Mercure dans le thon: après la France, faut-il s’inquiéter pour nos assiettes au Maroc?

Une boite de thon.

100 % des boîtes de thon en conserve testées en France contiennent du mercure. Une substance neurotoxique capable de freiner le développement du cerveau des enfants. Alors que ce poisson en boite est un classique des repas au Maroc, les ONG Bloom et Foodwatch réclament des mesures d’urgence pour protéger les enfants avant qu’il ne soit trop tard.

Le 26/09/2025 à 14h40

Plus de thon à la cantine, huit villes françaises ont retiré le poisson des menus scolaires. Paris, Lyon, Grenoble et cinq autres municipalités, représentant plus de 3,5 millions d’habitants, ont pris cette décision à la fin du mois d’août 2025, pour protéger les enfants de l’exposition au mercure, un métal neurotoxique dont les effets peuvent être graves sur le développement du cerveau. Cette mesure fait suite à une alerte lancée en octobre 2024 par les ONG Bloom (une ONG française spécialisée dans la protection des océans) et Foodwatch (une association européenne de défense des consommateurs), mettant en évidence des niveaux de mercure préoccupants dans le thon en conserve.

Une étude menée par ces associations a révélé que 100 % des 148 boîtes de thon analysées en Europe contenaient du mercure. Plus inquiétant encore, 57 % de ces échantillons dépassaient la norme la plus stricte en vigueur pour d’autres poissons, fixée à 0,3 mg/kg. Cette norme est appliquée aux petites espèces, tandis que celle pour les gros prédateurs comme le thon est établie à 1 mg/kg. Les autorités sanitaires européennes justifient cette différence en raison de la position du thon dans la chaîne alimentaire, mais les élus locaux estiment que cette exception ne protège pas suffisamment la santé des enfants.

Le mercure sous la loupe

Le mercure est un neurotoxique reconnu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), pouvant affecter le développement neurologique des enfants. Manger une seule conserve de thon de 100 grammes peut être dangereux pour un enfant de 20 kilos. Selon Bloom, même si le thon contient du mercure au niveau autorisé, l’enfant absorbe près de quatre fois la dose hebdomadaire considérée comme sûre. Cette situation a conduit les mairies à agir, estimant que la protection de la santé des enfants prime sur les normes actuelles.

La présence de mercure dans le thon en conserve n’est pas qu’un problème français. Au Maroc, ce poisson est un aliment de base, consommé régulièrement dans les foyers et parfois servi dans certaines cantines scolaires. Selon les chercheurs des ONG Bloom et Foodwatch, une consommation régulière de thon contenant du mercure, même aux niveaux autorisés, peut provoquer des effets cumulés sur la santé des enfants, affectant leur mémoire, leur motricité et leur concentration à l’école.

Les nutritionnistes recommandent ainsi de diversifier les sources de protéines et de privilégier des poissons moins sujets à la contamination. Au-delà des enfants, les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables, car le mercure traverse le placenta (organe temporaire qui relie l’embryon à la paroi utérine de la mère pendant la gestation) et peut altérer le développement neurologique du fœtus.

Les autorités sanitaires marocaines n’ont pas encore publié de recommandations officielles sur la limitation de consommation du thon en conserve, mais les ONG internationales insistent sur la nécessité d’une vigilance accrue et d’une information claire auprès du grand public.

Savoir consommer

Cependant, le thon reste un aliment riche en protéines et en acides gras oméga‑3, essentiels au bon développement du cerveau et au renforcement du système cardiovasculaire. Mais la consommation de thon en conserve, dont le mercure peut se concentrer davantage lors du processus de déshydratation, doit rester modérée. Il ne s’agit donc pas de le bannir complètement, mais de le consommer avec modération, comme n’importe quel autre aliment.

Pour les enfants de moins de 3 ans, particulièrement vulnérables au mercure, il est recommandé de privilégier d’autres sources de protéines et de limiter la consommation de thon de conservation afin de protéger leur développement neurologique d’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (ANSES). Tant que des recommandations officielles ne seront pas établies, la vigilance individuelle reste le principal rempart pour protéger les enfants.

Par Najwa Targhi
Le 26/09/2025 à 14h40