La vérité sur le transfert au Maroc de 30 chasseurs Mirage 2000-9 par les Émirats

Mirage 2000-9 émirati au décollage.

Recevra, recevra pas ? Rapportée par la presse espagnole, qui se contentait de citer des «sources nord-africaines», l’information sur le soi-disant feu vert donné par la France au transfert par les Émirats d’une trentaine d’avions de chasse Mirage 2000-9 au Maroc est désormais à prendre avec de «grosses» pincettes.

Le 16/04/2024 à 13h11

La Razón a été le premier à relayer la prétendue levée du veto français sur la cession par les Émirats arabes unis d’au moins une trentaine d’avions de chasse de type Mirage 2000-9 au Maroc. Une nouvelle qui n’a pas manqué de réjouir les internautes marocains, mais qui charrie toutefois un lot d’inexactitudes.

«Après avoir suspendu pendant trois ans sa décision, la France a accepté le transfert de 30 Mirage 2000-9 émiratis au Maroc. Cette décision a été adoptée après de nombreux doutes de la part de l’administration d’Emmanuel Macron», avait affirmé le média ibérique, expliquant dans la foulée que l’hésitation française était due «à la volonté de Paris de racheter 40 avions émiratis Mirage 2000-9 de grande capacité et de technologie moderne, afin de les transférer à l’Ukraine pour la soutenir dans sa guerre contre la Russie».

Contacté par Le360, Abdelhamid Harifi, analyste militaire et administrateur du forum FAR-Maroc, contredit cette hypothèse et explique, avec force détails, pourquoi elle a bien peu de chances de se produire. «Que les choses soient claires. Les Émirats arabes unis ne vont pas céder ces avions s’ils n’en reçoivent pas d’autres en remplacement. Et le remplacement n’est pas prévu pour aujourd’hui, mais à partir de 2027, avec des chasseurs Rafale», balaie-t-il.

Pour notre interlocuteur, il est absurde de croire que l’armée émiratie allait céder des avions de sa flotte militaire, car le pays doit «maintenir un certain niveau de dissuasion au vu de ce qui se passe aujourd’hui dans la région, où les tensions montent à des niveaux jamais atteints». Surtout qu’il s’agit, précise-t-il, «d’avions opérationnels, et non pas d’avions en stock, dont ils n’ont plus besoin».

L’expert en questions militaires va encore plus loin dans la remise en question des informations sur un possible deal. «D’ici 2027, ces chasseurs Mirage atteindront 18 ans ou 20 ans de vie opérationnelle. Le Maroc ne va pas donc reprendre des avions vieillissants et presque en fin de vie. Les gens qui parlent de technologie de pointe manquent manifestement de connaissances dans ce domaine», affirme-t-il.

Et de renchérir: «Ces avions sont adaptés à un certain niveau de risque. Ils ont certes la capacité de tirer des missiles Standoff ou de croisière pour des distances de 300 kilomètres, mais c’est, à mon avis, leur seul avantage. Et après tout, on ne va pas récupérer un poste de charge lourd. Ce sont des avions coûteux à entretenir, et je pense qu’il s’agit d’un sujet clos de notre part».

Pour Harifi, ce que l’on peut réaliser in concreto et dans un avenir très proche l’emporte. «Pour le moment, il faut que le Maroc commence par moderniser ses F-16 en service, et se prépare à recevoir de nouveaux F-16. À l’horizon 2027, l’ensemble de la flotte F-16 sera opérationnel, et les F-5 et les Mirage F-1 seront en fin de vie. L’armée marocaine décidera alors d’opter pour de nouveaux chasseurs ou de se limiter à un seul vecteur de chasse aérienne, en attendant d’avoir les moyens pour s’équiper convenablement en force aérienne», conclut-il.

Par Saad Bouzrou
Le 16/04/2024 à 13h11